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Le boulon électrique
31 janvier 2017

Les cheikhs

On distingue deux types de cheikhs dans la société djiboutienne : les cheikhs traditionnels, plus connus sous le nom de waadado, et les cheikhs modernes. Les premiers, souvent représentés par des hommes sexagénaires, ont des rôles très précis dans la société djiboutienne : faire l’appel à la prière, diriger la prière dans les mosquées, enseigner le coran aux enfants dans les écoles coraniques et lire les éloges du Prophète dans les cérémonies funéraires. Leur connaissance de la religion est le plus souvent limitée aux 30 chapitres du coran et les principaux hadiths (paroles) du Prophète. Ils n’ont pas suivi de cursus scolaire particulier en dehors des écoles coraniques et encore moins fréquenté l’université. Mais ils savent lire, écrire et accessoirement parler en arabe, la langue de l’islam. Leur contact avec les pays arabo-musulmans et de façon générale avec l’extérieur est très limité ou quasiment inexistant. Une minorité d’entre eux a étudié dans les pays voisins (Somalie et Ethiopie, voire au Yémen) auprès de cheikhs réputés des matières telles que le tafsir (interprétation ou exégèse du coran), le tawhid (unicité d’Allah) ou les sciences occultes inspirées de l’islam. Ils restent cantonnés à leur sphère et ne s’intéressent guère aux questions politiques. Les seconds, la quarantaine au plus, laissant les premiers à leurs tâches initiales, ont poursuivi un cursus universitaire de trois années minimum dans des pays arabes (Yémen, Soudan, Egypte, Arabie Saoudite, etc.) et dans un large éventail de spécialités en dehors de la théologie ou de la charia (droit islamique). Ils sont pour la plupart fonctionnaires de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et dispensent les cours d’arabe13. En parallèle, l’existence d’une multitude d’écoles privées en langue arabe, créées par des initiatives étrangères et nationales, offre des opportunités d’embauche aux arabisants après l’université14. La faiblesse de leur niveau en français réduit considérablement leurs perspectives de recrutement. Les oulémas modernes se distinguent des cheikhs traditionnels et ces derniers ne les portent pas toujours en grande estime. Ils sont plus éduqués, plus ouverts sur la société et le monde, maîtrisent mieux les subtilités de la religion et son besoin d’adaptation à l’époque moderne. Un travail méthodique dans les lieux de cultes a permis aux oulémas modernes d’évincer de la scène religieuse les cheikhs traditionnels et de se poser aux yeux des Djiboutiens comme les seuls oulémas, proches d’eux et conscients de leurs besoins spirituels. Les cheikhs traditionnels se débattent dans un oubli social, dépassés à la fois en théologie, dans la conduite de la prière avec le parcoeurisme et le maniement des techniques de lecture du coran, en maîtrise de la science islamique et en symbiose avec les préoccupations socioreligieuses des fidèles. Le cheikh moderne refuse d’ailleurs qu’on l’appelle waadad et se refuse à porter la connotation ringarde et rétrograde du terme. Ils sont au fait de l’actualité internationale et leur canal d’information privilégié est de loin la chaîne satellitaire arabophone Al Jazzera.

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